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13 janvier 2018 6 13 /01 /janvier /2018 09:33

J’aurais dû sentir qu’il y avait un truc louche vendredi quand la maman de Maximilien m’a demandé combien il y avait d’enfants dans la classe alors que c’est écrit en gros sur ma porte. Mais c’était vendredi, elle pouvait être fatiguée, et moi je l’étais de toute façon alors je n’ai pas noté.

Je n’ai par contre eu aucun mal à sentir les problèmes arriver quand je l’ai vue déballer son sac isotherme ce matin. Aujourd’hui, c’est l’anniversaire de Maximilien. 4 ans, et 4 fraisiers surgelés dans un grand sac Picard. Pas d’assiettes, pas de cuillères, pas de serviettes. Juste 4 fraisiers. Je regarde le contenu du sac qu’elle me tend. Je dois faire une drôle de tête parce qu’elle précise « c’est pour les 4 ans de Maxou ». Je bredouille un « Ah, oui ». Le regard dans le vide, déjà en train de m’imaginer la somme de galères à venir.

« Vous avez besoin des bougies ? J’ai acheté des bougies Cars ! » Va pour les bougies Cars. On n’est plus à ça près hein … Maxou entre dans la classe tout fier, et sa maman part en courant parce qu’elle est en retard. Et moi, je reste avec mon sac isotherme et mes bougies. Dans ma tête, j’annule la séance de sport. Servir un fraisier à 30 enfants de 3-4 ans, ça va faire un équivalent de sport. Et il faudra bien prévoir 30 à 45 minutes entre le service, la dégustation et le débarrassage.

Comme je suis seule dans la classe jusqu’à 9h15, je commence ma journée comme d’habitude. Et quand Laurence arrive, je lui présente la situation en lui demandant « Euh, tu sais si on a des assiettes en carton dans l’école ? » Elle aussi sent l’embrouille. Alors j’ouvre le sac. Elle regarde l’intérieur, me regarde, puis vérifie qu’elle a bien vu ce qu’elle a vu dans le sac. Oui, oui, on va devoir servir du fraisier à toute la classe. Finalement, en discutant, on préfère annuler une partie des ateliers. Parce qu’on va devoir asseoir tous nos élèves à une table et qu’après, ils auront surement besoin de se défouler. Laurence se met en quête d’assiettes, de cuillères et d’un gros rouleau de sopalin. Et moi je commence à improviser.

Pas d’ateliers « classiques » donc … Commençons par lire une histoire, puis chantons une chanson, et tiens, qui veut nous raconter son week-end ? Je meuble, et ça se voit. Les enfants s’agitent. D’habitude, à cette heure-là, le temps collectif est terminé, et ce n’est pas pour rien. Quand je sens que Laurence est presque prête, je lance la passation de consignes. On va manger du gâteau « Ouaiiiiiiiiiiiiiis ». Du gâteau aux fraises ! Suzon n’aime pas les fraises. Et comme c’est un gâteau qu’on mange avec une cuillère, on va aller s’asseoir aux tables d’ateliers et vous allez attendre sagement qu’on vous apporte une part. C’est bizarre. Ils le sentent. Ils sont méfiants et je le vois. On plante les bougies Cars dans un morceau de carton, on chante joyeux anniversaire à Maximilien tout fier, il souffle et puis tout le monde va s’asseoir.

C’est à ce moment-là que ça commence à déraper. Une fois la troupe installée, Laurence et moi nous commençons à distribuer les parts. Léonie veut retourner son assiette pour savoir si derrière elles sont décorées. Sidonie commence à manger avec les doigts. Célestin goûte, mais il n’aime pas, alors il se lève pour le dire à Laurence, qui tient dans ses mains 3 assiettes pour le groupe suivant, ne voit pas Célestin et renverse donc les assiettes. Sur Anatole qui se met à pleurer qu’il n’aime pas le fraisier, qu’il en a déjà goûté à l’anniversaire de Mamie Jeanine et qu’en plus maintenant il en a plein sur son beau pull. Apolline goûte, elle adore, et finit les assiettes des trois autres enfants de sa table.

En 10 minutes, il y a plus de fraisier sur les mains, les cheveux, les vêtements et le sol que dans l’estomac d’aucun de mes élèves. A part peut être celui d’Apolline. Six enfants m’ont déjà demandé s’ils étaient obligés de finir leur part, et cinq se demandent quand est-ce qu’on sort en récré. On se regarde avec Laurence, entre la crise de rire et la crise de larmes. Je demande le silence et j’annonce la récré. Les enfants sortent dans le couloir, pour une fois Laurence reste dans la classe, on passe aux toilettes pour se laver les mains, le visage, les cheveux et le reste, on s’habille, et on sort en récré avec 5 bonnes minutes d’avance. Quand la collègue de surveillance vient prendre le relais, elle me demande « Tu as eu un souci dans ta classe ce matin ? J’ai croisé Laurence avec le balai et la serpillère. » J’éclate de rire, et puis je raconte. Si Maximilien est dans sa classe l’année prochaine, je saurai lui rappeler de se méfier des questions anodines, le vendredi soir.

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